La France en Faillite
Sous le titre de «La France en Faillite la Cinq émet encore une fois un intéressant débat. On notera toutefois l’absence presque totale de questions des téléspectateurs. Le débat se déroule entre experts très souriant et assez imbus de leur niveau de préparation, vis à vis d’un public ignorant.
Les politiciens français n’échappent pas d’avantage à la critique de nos experts. Malheureusement tout le débat repose sur des statistiques et des indicateurs dont on sait qu’ils ne représentent plus guère la mesure des richesses produites par le travail des citoyens. Le sacro-saint PIB est brandit sans jamais être remis en cause. Les indicateurs du PNUD et autres ne sont jamais mentionnés. Tout est basé sur un thermomètre qui ne mesure plus ce pourquoi il à été créé autrefois et dans un monde très différent.
Un journaliste brillant et très sur de son fait déclare avec candeur que “aujourd’hui tout le monde est endetté” La dette est une bonne chose! Il mitige toutefois cette déclaration peremptoire en distinguant deux sources d’endettement: Les dépenses courantes et l'investissement. "La dette est mauvaise pour les premiers et bonne pour les seconds". Le raisonnement se base sur la fameuse “mondialisation” phénomène imparable, même si l’on n’entre pas dans la question de savoir s’il est bon au niveau de l’économie et la planète.
L’argument souvent utilisé de “c’est bon puisque tout le monde le fait” est un peu faible. On ne se pose pas un instant la question de savoir si la mondialisation n’est déjà pas en train de céder la place à un autre modèle économique car elle semble condamnée, dans certains de ses fondements et mécanismes, entre autre par la fin du pétrole et par l’éveil tout récent des pays endettés vis-à-vis des stratégies du FMI et de la Banque Mondiale.
Pour en revenir à la distinction entre dépenses et investissements on présente ensuite l’Education Nationale comme une dépense, pas comme un investissement. Ceci ne manque pas d’ironie quand on est dans la société de la connaissance et de l’information!
Rappelons l’expression américaine : «Si vous croyez que l’éducation est coûteuse, essayez l’ignorance »
Très pertinent la question du rendement de l’effort éducatif, mais pourquoi parler de rendement de la «dépense» et pas de «l‘investissement» ?
Manifestement nos «experts»s nagent avec dextérité dans la confusion.
Naturellement la croissance est la solution proposée. Mais pas de définition de cette croissance. Le mot magique (qui ne dit plus rien) est prononcé comme la solution indiscutable.
Enfin une question d’un (ou de nombreux téléspectateurs ?) est habilement esquivée : Question : « à qui profite la dette ? Aux banques ? » Réponse: La gestion de la dette de l’état n’est pas très rentable pour ces dernières. Alors d’où vient la spirale du surendettement des états? L’absurdité de devoir s’adresser à des organisations privées pour créer la monnaie nécessaire au bon fonctionnement de l’état n’est pas un instant soulevée.
Personnellement j’ai l'impression d'avoir assisté à un spectacle d’échanges d’égos entre personnes adultes parlant de choses très graves avec des grands sourires d’experts pour qui ces questions sont des jeux d’érudition, incapables de sortir du carcan des idées reçues dans un cadre qui n’est jamais remis en question. Ce qui produit naturellement des raisonnements tautologiques et des prophéties qui s’accomplissent par le simple fait d’y croire avec une foie presque mystique.
On lira avec intérêt l’excellent livre de Patrick Viveret. «Reconsidérerla Richesse» Ce livre est la conséquence d’un rapport commandé par un secrétaire d’État à l’Économie Solidaire, rapport qui dort dans quelque tiroir de l’administration et qui n’à même pas fait l’objet d’un débat public.
On aimerait savoir si nos « experts » de l’émission de la Cinq le connaissent, ou en ignorent l’existence, ou le considèrent comme une utopie qui ne mérite même pas d’être mentionnée en tant qu'apport pour un vrais débat.
J’ai trouvé cette émission assez décevante par rapport à d’autres débats beaucoup plus profonds sur des questions qui nous affectent, à tous les citoyens.
Or la question des monnaies et de la financiarisation toujours plus accélérée de l’économie sont absolument centrales si l’on veut éviter la grande crise qui s’annonce.
Peu importe que les causes de cette crise soient monétaires, comme le prédisent certains, écologiques comme le pensent d’autres, ou sociales et démographiques ou enfin un mélange des ces menaces qui ne cessent de grandir. Ce n’est pas en restant dans une logique vieillie, démodée et plus du tout en relation avec le monde réel que l’on pourra l’éviter, ou la résoudre au niveau «micro» de la discipline économique, alors qu’elle se joue au niveau « macro » de la planète.